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Contributor: gh0st
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L art Introduction l ments d histoire de l art Une tr s br ve histoire de l art Gombrich La suppression des temps morts Kundera Quand l art se lib re des contraintes r alistes Sarraute La question du progr s Hegel L uvre d art l poque de sa reproductibilit technique Benjamin I Comment d finir l art A Qu est-ce qu une uvre d art Une production humaine La question de l utilit Un statut social B La notion de beaut La question de l objectivit le beau et l agr able Kant Le rapport la volont le beau et le joli Schopenhauer et Nietzsche La norme du go t Hume C La cr ation artistique Le mythe de l inspiration Kant La cr ation est le fruit d un travail Nietzsche Le cr ateur selon la psychanalyse Freud La cr ation artistique est un acte de communication La cr ation et la r ception artistiques selon Nietzsche II Les fins de l art Introduction La diversit des sentiments esth tiques A Le beau La seule r gle est de plaire Moli re La beaut formelle quilibre et harmonie Kant Quelques perspectives sur la beaut a Le kitsch Kundera b Le beau est toujours bizarre Baudelaire c Dionysiaque et apollinien Nietzsche d Beaut et utilit Gautier e Beaut et mysticisme Platon Baudelaire Mallarm B Le vrai L art nous loigne de la v rit car les apparences sont trompeuses Platon Nietzsche L imitation de la nature est un moyen d acc s la v rit Aristote Mentir pour faire vrai impressionnistes Maupassant L expressionnisme Van Gogh L expression des forces Schopenhauer Deleuze L art r v le la perception elle-m me Michel Henry Le d voilement de la terre et du monde Heidegger L art est expression des id es et de l esprit C Le bien L art au service de la lib ration supr me Schopenhauer L art au service de la vie Nietzsche L art au service du bien Tolsto Le go t comme facult thique et politique Kant Arendt L art au service du politique Platon totalitarisme art engag Art et distinction sociale Bourdieu Annexe R sum La question de l imitation de la nature Toute une partie de l art imite la nature Arasse L art ne vise pas imiter la nature Hegel La nature imite l art Goethe Wilde Autres remarques Synesth sie et signification des sensations Kandinsky Un souvenir d enfance de L onard de Vinci Freud Sensibilit et r sonance Proust Le rire Autres th ses Illustrations et r f rences Exemples Citations Bibliographie Sujets de dissertation Documents et commentaires Un peu de po sie Charles Baudelaire Arthur Rimbaud Paul Verlaine Nietzsche Lautr amont Le futurisme de Marinetti Compl ments th oriques La philosophie de l art de Platon La philosophie de l art de Kant La philosophie de l art de Hegel La philosophie de l art de Schopenhauer La philosophie de l art de Nietzsche Introduction l ments d histoire de l art Une tr s br ve histoire de l art Gombrich Diaporama L art gyptien a une fonction essentiellement religieuse Il s agit d entourer le pharaon de la repr sentation des choses pour qu il soit accompagn au paradis Par cons quent les repr sentations artistiques doivent restituer le plus fid lement possible la nature de chaque chose C est pourquoi chaque chose est repr sent e sous son aspect le plus caract ristique l il de face le visage de profil le torse de face le pied de profil les poissons et les arbres de profil etc Le raccourci est donc exclu Grande rigidit et esprit de tradition qui interdit toute innovation sauf l poque d Am nophis IV Akhenaton qui introduit mouvement et lib re un peu les formes Mais cette parenth se sera vite referm e L art grec s appuie d abord sur l h ritage gyptien puis invente le raccourci Les figures id ales ternelles h rit es de l art gyptien se voient progressivement insuffler vie et mouvement Outre le raccourci les artistes grecs parviennent rendre le mouvement et les effets des draperies sur le corps avec une aisance remarquable En architecture Iktinos construit le Parth non vers av J -C et le sculpteur Phidias le d core par ses frises Le Ve si cle si cle de P ricl s marque l apog e de l art grec L art romain constitue un prolongement de l art grec dont il s inspire consid rablement Avec la chute de Rome et l apparition du christianisme apparurent de nouveaux probl mes Une question fondamentale fut de d terminer le r le des images dans la religion La Bible avait condamn les idoles Les chr tiens ne voulaient donc pas de statues mais sur la peinture ils taient partag s Certains pensaient qu elle pouvait rappeler aux fid les g n ralement analphab tes les pisodes sacr s Mais tout le monde n tait pas de cette avis ce qui donna lieu la querelle des iconoclastes et des iconodules Les iconodules finirent par l emporter Une grande partie de l art m di val consiste illustrer les mythes religieux ce qui soumet les artistes certaines contraintes mais leur donne aussi une certaine libert d interpr tation des mythes bibliques qu ils illustrent L uvre d art doit alors tre comprise non comme une pure recherche de beaut formelle mais surtout comme le moyen de transmettre un message Ex le Saint Matthieu de Caravage L Annonciation d Ambrogio Lorenzetti En architecture l art gothique appara t en le-de-France au XIIe si cle La vo te en ogive permet d all ger les difices et donc de leur donner davantage de hauteur et de l g ret Avec la Renaissance du XIVe au XVIe si cle les artistes red couvrent l art classique grec et romain et le r alisme redevient une pr occupation centrale C est ainsi que les artistes qui sont en m me temps des rudits et des savants d couvrent la perspective L onard de Vinci invente le sfumato qu il utilise pour peindre la Joconde ce proc d consiste laisser floues certaines parties du visage notamment les commissures des l vres et des yeux pour lui donner davantage de mobilit et de vie L impressionnisme Comme la Renaissance les peintres renoncent la rigoureuse exactitude afin de mieux restituer les impressions visuelles Il ne s agit pas d tre vrai mais de faire vrai Et il faut parfois tre moins vrai pour faire plus vrai comme le remarque Maupassant en litt rature Claude Monet bient t rejoint par Edouard Manet est un des premiers remettre en cause l exactitude formelle afin de mieux sugg rer l impression r elle On peut donc dire que du d but du XIVe si cle la fin du XIXe si cle l art a t structur par le principe de l imitation de la nature L impressionnisme donne rapidement naissance trois mouvements principaux qui marquent une v ritable r volution en mettant fin ces six si cles de r alisme Plut t que de restituer les impressions r elles Van Gogh pr f re exprimer la mani re subjective dont il per oit les choses Il cherche constamment aller au-del des simples apparences pour faire appara tre l tre profond des choses la vie et les convulsions de la nature le caract re sordide et fou d un caf populaire etc L expressionnisme de Van Gogh et de Munch donnera lieu au mouvement de la nouvelle objectivit dans les ann es puis l expressionnisme abstrait qui appara t dans les ann es avec l action painting de Jackson Pollock pratique consistant projeter la peinture sur la toile sans toucher celle-ci du pinceau dripping C zanne tait s duit par les avanc es de l impressionnisme mais insatisfait par l aspect instable et fragile de ces peintures Il voulait donner l impressionnisme un quilibre et une stabilit digne des plus grands chefs-d uvre du pass Aussi renon a-t-il progressivement au r alisme se dirigeant vers une recherche purement formelle d harmonie et d quilibre qui fait de lui le pr curseur du cubisme et de l art abstrait Cette voie f conde sera poursuivie par Kandinsky Malevitch Picasso Rothko Soulages Gauguin quant lui s est principalement int ress aux couleurs et aux cultures primitives m par le d sir de revenir une forme de puret originelle et enfantine Ses recherches sont l origine du fauvisme dont Henri Matisse est un grand repr sentant qui donnera ensuite naissance au primitivisme mouvement Cobra art brut art na f etc En architecture la fin du XIXe si cle est marqu e par l art nouveau qui de l Espagne la Belgique tente d introduire des formes radicalement nouvelles souples et oniriques dans des constructions utilisant des mat riaux modernes m tal verre Ex les constructions d Antonio Gaudi en Espagne les dicules du m tro parisien dessin s par Hector Guimard Avec son urinoir Fountain de Marcel Duchamp inaugure le ready-made un objet industriel auquel l artiste se contente d apposer sa signature Le mouvement de la contestation de l art et de l exploration de ses limites est engag Il durera tout au long du XXe si cle Mentionnons par exemple l art al atoire Morellet en peinture John Cage en musique Le surr alisme n dans les ann es est issu du dada sme et de la d couverte de l inconscient par Freud Les peintres surr alistes Salvador Dal et Ren Magritte pour ne citer que les plus connus cherchent exprimer le monde onirique par leurs repr sentations souvent tonnantes Le surr alisme h ritier du dada sme se veut r volutionnaire y compris dans le champ politique par son alliance temporaire avec les mouvements r volutionnaires communistes Il donnera ensuite naissance au lettrisme l Oulipo et enfin au situationnisme Le situationnisme mouvement artistique le plus radical veut mettre fin l art s par l art des uvres d art et des artistes en faveur d un art de la vie Il s agit de faire de sa vie une uvre d art de construire des situations dans la vie quotidienne La suppression des temps morts Kundera La suppression des temps morts dans l uvre d art en musique de Beethoven Chopin en philosophie de Hegel Nietzsche en litt rature de Dosto evski Breton Les musiciens classiques reliaient leurs id es musicales par des transitions longues et laborieuses Chopin met fin cela en limitant son morceau sa pure intuition utilisant souvent une forme courte nocturne tude Hegel et les philosophes classiques ressentaient un besoin d ordre et d exhaustivit et crivaient de longs laborieux et ennuyeux ouvrages Nietzsche adopte la forme de l aphorisme qui lui permet d crire directement sa pens e dans toute sa puret et sa singularit Dosto evski et les crivains classiques ressentaient la n cessit de donner de longues descriptions cela ennuie Andr Breton et il y met fin s en tenant l essentiel Kundera Les Testaments trahis chap Quand l art se lib re des contraintes r alistes Sarraute Nathalie Sarraute est crivain et critique litt raire du XXe si cle Elle tablit un parall le entre l histoire r cente de la litt rature et de la peinture de la m me mani re qu en peinture avec l art abstrait l l ment pictural s est lib r des conventions et de la contrainte de la forme r aliste de m me en litt rature l l ment psychologique s est lib r de la vieille forme r aliste des personnages Le nouveau roman est la litt rature ce que l art non figuratif est la peinture Nathalie Sarraute rejoint d ailleurs Kundera en affirmant que la morale du roman est dans la d couverte de la nouveaut La question du progr s Hegel Une question essentielle que pose la consid ration de cette succession de courants artistiques de tendances de pr occupations et d uvres d arts est de savoir s il existe un progr s en art Assur ment il n y a pas un progr s en un sens aussi pr cis et rigoureux que dans la science ou la technique car la cr ation artistique ob it des crit res et des valeurs moins univoques que celles de ces disciplines Toutefois du seul fait qu il y ait une histoire de l art c est- -dire une m moire des uvres pass es il ne saurait y avoir de pure r p tition et en ce sens nous devons admettre qu il existe n cessairement une forme de progr s De plus l art peut tre consid r comme une investigation th orique au m me rang que la science quoique il op re dans un domaine diff rent et selon des r gles diff rentes Kundera consid re ainsi que l histoire du roman depuis le xviie si cle est parall le celle de la science celle-ci tudie la nature par des m thodes math matiques celui-ci tudie la vie humaine par la narration et l invention de situations concr tes contrairement la philosophie qui l tudie abstraitement L histoire du roman se pr sente donc selon Kundera comme une forme de cartographie de l existence humaine une exploration des possibilit s d existence Hegel a une vision encore plus inclusive du progr s artistique il consid re que l art dans son ensemble a volu travers trois grandes tapes principales selon un progr s constant D abord l art symbolique cherche r aliser l union entre la signification interne et la forme ext rieure art gyptien Dans l art classique l quilibre entre le fond et la forme est atteint art grec Dans l art romantique enfin la signification interne d passe la forme il y a une nouvelle s paration entre le fond et la forme car la forme est devenue incapable de repr senter le fond art religieux Hegel consid re d ailleurs que l art est parvenu sa fin au d but du XIXe si cle c est- -dire qu il ne remplit plus sa fonction supr me originelle il n est plus en mesure de satisfaire notre besoin de v rit et d absolu A l art a succ d la religion puis la philosophie Il ne faut donc pas condamner trop vite le diagnostic h g lien de la fin de l art en se contentant de constater l explosion des arts aux XIXe et XXe si cles Il faut se demander si l art a eu de nouveau la fonction ontologique qu il avait eue dans le pass Le simple fait que nous r fl chissions sur l art qu il y ait une esth tique et une philosophie de l art c est- -dire que l on se demande qu est-ce que le beau suffit au fond donner raison Hegel L art n est plus direct imm diat et absolu il a besoin de la philosophie comme m diation I Comment d finir l art A Qu est-ce qu une uvre d art Une production humaine Commen ons par une vidence l uvre d art est produite par l homme Toute uvre d art est un artefact ce qui la distingue d j de l ensemble des choses naturelles La question de l utilit Mais ce premier crit re ne suffit pas pour d finir l uvre d art Car les objets techniques outils v tements etc aussi sont des productions humaines Ce qui semble distinguer les uvres d art des objets techniques et donc l art au sens des beaux-arts de la technique ou artisanat c est l utilit les uvres d art semblent inutiles alors que les objets techniques ont tous une fonction Hannah Arendt insiste sur ce point dans la Crise de la culture Pour elle les uvres d art doivent tre mises l cart de nos pr occupations utilitaires sans quoi elles sont immanquablement d voy es et r duites n ant M me l usage divertissant des uvres d art qui explose avec leur r cup ration par l industrie du loisir est pour Arendt une aberration qui fait courir un tr s grave p ril ces uvres en les r duisant un simple moyen de procurer du plaisir occultant leur v ritable sens Bien des grands auteurs du pass ont surv cu des si cles d oubli et d abandon mais c est encore une question pendante de savoir s ils seront capables de survivre une version divertissante de ce qu ils ont dire D un strict point de vue esth tique Th ophile Gautier le p re de l art pour l art remarquait que tout ce qui est utile est laid nous reviendrons sur ce point par la suite En r alit ce crit re n est pas aussi clair qu il para t Ce n est que depuis la fin du XVIIIe si cle que le mus e qui carte d lib r ment l uvre d art de tout usage pour la r server la contemplation pure en est devenu le lieu d exposition privil gi Avant d entrer au mus e les uvres d art avaient g n ralement une fonction sociale religieuse ou symbolique Les f tiches primitifs les masques magiques les pyramides le temple grec et les glises ont une fonction religieuse Les portraits r pondaient une demande sociale venant des riches et des puissants Enfin de tout temps l art a servi se distinguer et signifier le pouvoir symbolique et politique des individus le chef indien est celui dont la coiffe compte le plus grand nombre de plumes Si l on ajoute que les objets techniques sont souvent utilis s non pas pour des raisons pratiques mais pour des raisons symboliques ex acheter un v tement pour se donner un style plut t que pour se prot ger du froid la confusion sera son comble On pourrait peut- tre persister n anmoins dans cette voie en disant que l uvre d art si elle peut avoir une fonction symbolique n a jamais de fonction utilitaire contrairement l objet technique qui m me si on l utilise aussi d autres fins a toujours n anmoins une utilit pratique propre Un statut social Il faut donc renoncer au crit re de l utilit pour d finir l uvre d art Nous pourrions encore proposer comme crit re l unicit mais celui-ci est remis en cause par la possibilit avec la technique moderne de reproduire une uvre d art et m me par l apparition d uvres intrins quement reproductibles cin ma photographie sculpture Toute autre tentative de d finir l uvre d art risque d tre d avance condamn e l chec car les artistes depuis Duchamp s ing nient remettre en cause toute d finition de l art par la transgression des r gles et des limites traditionnelles Aussi faut-il sans doute se contenter de d finir l uvre d art partir de son statut social est une uvre d art tout objet qui est reconnu comme tel Ce qui fait qu un objet est une uvre d art ce n est pas une propri t inh rente cet objet mais une certaine attitude que nous adoptons envers cet objet B La notion de beaut La question de l objectivit le beau et l agr able Kant La beaut est-elle une propri t objective des choses ou est-elle seulement subjective A premi re vue il semble que la beaut est purement subjective qu elle d pend davantage du sujet que de l objet Des go ts et des couleurs on ne discute pas comme dit la sagesse populaire Et il faut bien reconna tre que les jugements esth tiques ne font pas l unanimit ce que l un trouve splendide l autre l ex cre Pire la m me personne peut trouver le m me objet tant t beau tant t laid tant t indiff rent selon les variations de son humeur et de sa sensibilit Faut-il donc tomber dans un pur relativisme Ne peut-on pas d passer ce relativisme pour discuter objectivement des qualit s et des d fauts d une uvre d art Kant reconna t que les go ts sont subjectifs mais il distingue soigneusement le beau de l agr able Est dit beau selon Kant un objet qui produit une satisfaction d sint ress e c est- -dire une satisfaction ind pendante de l existence de l objet Un objet un palais un plat de fruits une femme peut plaire en raison de son existence et de l usage que nous pourrions en faire habiter manger avoir un rapport sexuel Dans ce cas la satisfaction est int ress e et on ne dit pas que l objet est beau on dit qu il est agr able bon ou int ressant confortable app tissant excitant Kant d finit donc ainsi la beaut on appelle beau l objet d une satisfaction d sint ress Est beau ce qui pla t par sa seule repr sentation ind pendamment de l existence de la chose On appelle int r t la satisfaction qui est li e pour nous la repr sentation de l existence d un objet Une telle repr sentation a donc toujours du coup une relation la facult de d sirer soit en tant qu elle est son principe d terminant soit en tant qu elle est tout au moins n cessairement li e son principe d terminant Mais quand la question est de savoir si une chose est belle ce que l on veut savoir ce n est pas si l existence de cette chose a ou pourrait avoir quelque importance pour nous-m me ou pour quiconque mais comment nous en jugeons quand nous nous contentons de la consid rer dans l intuition ou la r flexion Si quelqu un me demande si je trouve beau le palais que j ai devant les yeux je peux toujours r pondre que je n aime pas ce genre de choses qui ne sont faites que pour les badauds ou bien comme ce sachem iroquois qui n appr ciait rien Paris autant que les r tisseries je peux aussi dans le plus pur style de Rousseau r criminer contre la vanit des Grands qui font servir la sueur du peuple des choses si superflues je puis enfin me persuader bien ais ment que si je me trouvais dans une le d serte sans espoir de revenir jamais parmi les hommes et si j avais le pouvoir de faire appara tre par magie par le simple fait de ma volont un difice si somptueux je ne prendrais m me pas cette peine d s lors que je disposerais d j d une cabane qui serait assez confortable pour moi On peut m accorder tout cela et y souscrire mais l n est pas le probl me En posant ladite question on veut seulement savoir si cette pure et simple repr sentation de l objet s accompagne en moi de satisfaction quelle que puisse tre mon indiff rence concernant l existence de l objet de cette repr sentation Il ne faut pas se soucier le moins du monde de l existence de la chose mais y tre totalement indiff rent pour jouer le r le de juge en mati re de go t Emmanuel Kant Critique de la facult de juger Par cons quent l agr able est subjectif mais le beau est objectif En effet ce sont les int r ts qui sont subjectifs et varient d un sujet l autre Si la satisfaction esth tique est d sint ress e elle ne d pend pas des particularit s de chacun et doit tre universelle un bel objet doit susciter la m me satisfaction en chaque homme Kant en d duit que le beau est l objet d une satisfaction n cessaire et universelle Le rapport la volont le beau et le joli Schopenhauer et Nietzsche Cette doctrine kantienne du d sint r t a subi diff rentes interpr tations Schopenhauer la reprend car il voit dans la contemplation esth tique ce qui met fin la volont ce qui nous en lib re Cela permet de distinguer le beau du joli Ce qui est joli stimule la volont alors que ce qui est beau apaise la volont C est toute la diff rence entre les repr sentations rotiques et les repr sentations artistiques de la femme entre Playboy et Michel-Ange Nietzsche remarque avec malice que cet apaisement de la volont est pour Schopenhauer loin d tre d sint ress il est au contraire tr s int ressant car parvenir la n gation de la volont est le but supr me dans la philosophie de Schopenhauer Mais il faut bien voir que Schopenhauer a pris le concept de d sint r t en un sens diff rent de celui de Kant Pour Kant le beau est l objet d une satisfaction d sint ress e Cela ne signifie pas que cette satisfaction nous lib re de la volont mais cela signifie qu elle est ind pendante de tout int r t Nietzsche oppose ce d sint r t kantien la conception de Stendhal le beau est une promesse de bonheur La satisfaction esth tique loin d tre d sint ress e est troitement li e nos int r ts elle est la fois int ress e et int ressante La belle uvre d art est celle qui stimule la volont et la vie On retrouve ici le crit re de la vie que Nietzsche utilise pour juger toute chose Sera donc beau l art qui stimule sublime embellit et divinise la vie On peut retenir de Kant l id e que le jugement esth tique ne tient pas compte de l existence de la chose qu il la juge simplement en tant que repr sentation Mais il faut visiblement renoncer l id e que la beaut est ind pendante de tout int r t La satisfaction peut tre ind pendante de l existence de la chose mais n anmoins proc der d un int r t g n ral pour ce genre de chose Il se pourrait que nous trouvions une femme belle m me si nous ne la d sirons pas parce que nous avons l habitude de d sirer les femmes Et de mani re plus g n rale il se pourrait que l ensemble de notre sensibilit esth tique soit d riv e de nos int r ts biologiques S il en est ainsi la satisfaction esth tique peut tre ind pendante de l existence de l objet tout en d pendant d un int r t Cette critique se justifie aussi partir d un simple constat l universalit du beau que Kant d duit a priori ne se v rifie pas dans les faits les jugements esth tiques concrets ne concordent pas Faut-il donc en revenir au relativisme de d part Ne peut-on tout de m me pas sans aller aussi loin que Kant reconna tre qu il existe une certaine objectivit en mati re de go t et une possibilit de discuter objectivement des qualit s et des d fauts d une uvre d art La norme du go t Hume C est sur cette voie mod r e que nous invite Hume Certes les go ts semblent subjectifs Mais il est parfois vident qu une uvre est sup rieure une autre Comment concilier ces deux faits Hume remarque que pour ressentir la beaut il faut d velopper une sensibilit une d licatesse du go t c est- -dire une sensibilit d li e fine aiguis e subtile p n trante Le go t ainsi entendu se d veloppe avec la connaissance l habitude de l uvre la pratique Il requiert aussi la raison et la mise l cart des pr jug s Ceci permet de comprendre que les go ts divergent bien que la beaut soit objective Les bons juges les connaisseurs les experts les sp cialistes tomberont d accord mais ils sont rares car pour tre un bon juge il faut un sens fort un sentiment d licat de la pratique il faut savoir comparer et ne pas avoir de pr jug s Les verdicts de tels hommes constituent la norme du go t et de la beaut Ainsi la diversit des jugements esth tiques y compris entre les diff rentes cultures qui ont des codes des traditions et des go ts esth tiques diff rents peut tre selon Hume d pass e en faisant appel cette id e de l expert Hume ajoute que l uvre d art peut tre jug e plus ou moins parfaite selon qu elle est plus ou moins bien calcul e pour atteindre sa fin Le but de la po sie est de plaire le but de l histoire est d instruire le but de l loquence est de persuader Pour juger objectivement de la valeur d une uvre d art il faudrait donc se pencher sur sa cr ation par l artiste C La cr ation artistique Le mythe de l inspiration Kant La conception la plus courante de la cr ation artistique est sans doute celle du g nie inspir Selon ce mythe quelque peu romantique l artiste serait une sorte d homme extraordinaire qui se verrait soudain saisi d une inspiration divine mystique ineffable et incontr lable C tait d j la conception des Grecs et notamment de Platon qui voyait dans l artiste un homme inspir par les Muses Au rhapsode Ion qui est incapable d expliquer pourquoi il est extr mement talentueux pour faire parler Hom re mais moins bon en ce qui concerne les autres po tes Socrate explique Ce n est pas un art qui se trouve en toi et te rend capable de bien parler d Hom re Non c est une puissance divine qui te met en mouvement comme cela se produit dans la pierre qu Euripide a nomm e Magn tis et que la plupart des gens appellent H racl e Platon Ion d Le rhapsode est enthousiaste au sens tymologique du terme il est attir par la Muse comme par un aimant et de la m me mani re que l aimant transmet son pouvoir d attraction aux m taux sur lesquels il exerce ce pouvoir la Muse elle seule transforme les hommes en inspir s du dieu Et quand par l interm diaire de ces tres inspir s d autres hommes re oivent l inspiration du dieu eux aussi se mettent la cha ne Platon Ion e Il est frappant de voir qu on retrouve la m me image chez l crivain am ricain Henry Miller v ritable g nie inspir qui raconte dans Sexus comment sa mani re d tre attiraient ceux qui en avaient besoin autour de lui comme un aimant et ces personnes se trouvaient magn tis es elles aussi et attiraient d autres personnes leur tour On trouve chez Kant la m me id e d un don inn le g nie est la disposition inn e de l esprit ingenium par laquelle la nature donne ses r gles l art Et Goethe illustre cette th orie quand il affirme qu il cr e d abord ses personnages et que ces personnages se trouvent ensuite incarner ses id es Plus g n ralement il est tr s fr quent que l artiste soit incapable de rendre compte de sa cr ation il sait cr er mais il ne sait pas l expliquer Kant en d duit que les uvres du g nie sont des mod les exemplaires qui fournissent les r gles de l art et le crit re du beau bien que nul ne soit capable d expliciter ces r gles Le g nie ne conna t aucune r gle et ne peut expliciter sa cr ation mais ses uvre fournissent n anmoins le mod le des r gles de l art La cr ation est le fruit d un travail Nietzsche Mais cette conception n est-elle pas exag r ment romantique C est en ce sens que Nietzsche l a critiqu e Une telle conception est rassurante si le g nie est un don inn et magique nous n avons pas nous reprocher notre inf riorit par rapport lui elle conforte notre vanit et notre amour-propre CULTE DU GENIE PAR VANITE Pensant du bien de nous mais n attendant pourtant pas du tout de nous de pouvoir former seulement l bauche d un tableau de Rapha l ou une sc ne pareille celles d un drame de Shakespeare nous nous persuadons que le talent de ces choses est un miracle tout fait d mesur un hasard fort rare ou si nous avons encore des sentiments religieux une gr ce d en haut C est ainsi que notre vanit que notre amour-propre favorise le culte du g nie car ce n est qu condition d tre suppos tr s loign de nous comme un miraculum qu il ne nous blesse pas Goethe m me l homme sans envie nommait Shakespeare son toile des hauteurs lointaines sur quoi l on peut se rappeler ce vers Les toiles on ne les d sire pas Mais abstraction faite de ces suggestions de notre vanit l activit du g nie ne para t pas le moins du monde quelque chose de fonci rement diff rent de l activit de l inventeur en m canique du savant astronome ou historien du ma tre en tactique Toutes ces activit s s expliquent si l on se repr sente des hommes dont la pens e est active dans une direction unique qui utilisent toutes choses comme mati re premi re qui ne cessent d observer diligemment leur vie int rieure et celle d autrui qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens Le g nie ne fait rien que d apprendre d abord poser des pierres ensuite b tir que de chercher toujours des mat riaux et de travailler toujours y mettre la forme Toute activit de l homme est compliqu e miracle non pas seulement celle du g nie mais aucune n est un miracle D o vient donc cette croyance qu il n y a de g nie que chez l artiste l orateur et le philosophe qu eux seuls ont une intuition Mot par lequel on leur attribue une sorte de lorgnette merveilleuse avec laquelle ils voient directement dans l tre Les hommes ne parlent intentionnellement de g nie que l o les effets de la grande intelligence leur sont le plus agr ables et o ils ne veulent pas d autre part prouver d envie Nommer quelqu un divin c est dire ici nous n avons pas rivaliser En outre tout ce qui est fini parfait excite l tonnement tout ce qui est en train de se faire est d pr cier Or personne ne peut voir dans l uvre de l artiste comment elle s est faite c est son avantage car partout o l on peut assister la formation on est un peu refroidi L art achev de l expression carte toute id e de devenir il s impose tyranniquement comme une perfection actuelle Voil pourquoi ce sont surtout les artistes de l expression qui passent pour g niaux et non les hommes de science En r alit cette appr ciation et cette d pr ciation ne sont qu un enfantillage de la raison Nietzsche Humain trop humain I Mais l id e de don inn est aussi d courageante pour l artiste C est pourquoi la conception nietzsch enne qui insiste sur le travail de l artiste a aussi une valeur de stimulation Le g nie c est un pour cent d inspiration et quatre-vingt-dix-neuf pour cent de transpiration disait Thomas Edison Cette interpr tation du g nie tend galement minimiser la distinction entre l artiste et les autres cr ateurs comme le scientifique l artisan ou le technicien NB pour voquer cette diff rence entre les uvres qui sont le fruit d un long travail et celles qui sont le fruit de l inspiration on parle d uvres qui sentent l huile pour d signer les premi res de mani re p jorative l huile tait utilis e pour les lampes quand on travaille tard dans la nuit et qui sentent le vin pour parler des autres Le cr ateur selon la psychanalyse Freud La psychanalyse claire la cr ation artistique d un jour encore diff rent Freud consid re que l art est essentiellement d obtenir dans un monde imaginaire des satisfactions libidinales qui nous sont refus es dans le monde r el L artiste est ce personnage qui parvient en quelque sorte nous faire partager ses r ves d enfants gr ce la prime de s duction cette perfection formelle de l uvre qui nous s duit et nous permet d identifier nos d sirs refoul s aux siens Si on pousse cette interpr tation jusqu au bout l uvre d art est un sympt me au m me titre que le r ve et on peut psychanalyser l artiste partir de son uvre C est ce qu a tent Freud pour L onard de Vinci En rapprochant un souvenir d enfance consign par Vinci dans ses carnets du c l bre tableau intitul La Vierge l enfant Freud pense pouvoir montrer que L onard de Vinci en est rest au stade oral et qu il tait donc homosexuel Au del de ce cas singulier on peut remarquer l analogie profonde entre le travail du r ve et le travail du peintre dans les deux cas il s agit de transformer la pens e en image et on retrouve les m mes processus de condensation et de d placement La peinture transforme donc un texte en figures nigmatiques Le travail du r ve les op rations d crites par Freud pour rendre compte de ce travail que fait le r ve transforment les pens es en images tout comme un tableau Toutes ces op rations de condensation de prise en consid ration de la figurabilit de d placement et d laboration secondaire sont tr s op ratoires en ce qui concerne l analyse de la peinture pour ce travail propre de pens e de la peinture Daniel Arasse Histoires de peintures chap L approche freudienne pose une question importante concernant la mani re de recevoir une uvre d art faut-il la lire la lumi re de la vie de l auteur ou au contraire consid rer qu elle en est ind pendante D un c t un grand nombre de critiques et d esth tes sont tent s d interpr ter les uvres d art partir de la vie de leur cr ateur afin d en acqu rir une meilleure compr hension D un autre c t certains pensent qu une telle approche est inad quate qu elle constitue un d tournement et un d voiement de l uvre d art L auteur en effet a mis tout ce qu il voulait en elle elle est cens e exister par elle-m me et se pr senter par elle-m me pourquoi donc y m ler la vie de l auteur Ce point de vue est notamment d fendu avec vigueur par Milan Kundera par exemple au sujet de Kafka dont il condamne la psychologisation de l uvre dans Les Testaments trahis Nous devons faire confiance l auteur dit-il et appr cier les uvres pour elles-m mes pour leur beaut intrins que et non les r duire la vie de leur cr ateur La cr ation artistique est un acte de communication Insistons pour terminer sur la dimension de communication de l uvre d art L artiste n est pas un tre isol il s ins re dans une soci t pleine de valeurs et de codes mue par des recherches et des int r ts et qui h rite d une tradition bien particuli re L artiste se situe par rapport ce contexte et en ce sens sa cr ation peut tre comprise comme un acte de langage qui utilise certains codes pour r pondre certains probl mes Ainsi concr tement il est souvent impossible de comprendre une uvre d art sans comprendre le contexte culturel qui a donn lieu son apparition L uvre d art na t est le fruit d une poque plus encore que la production singuli re d un individu La cr ation et la r ception artistiques selon Nietzsche Pour terminer voquons la philosophie de l art de Nietzsche et de Schopenhauer L id e est que les diff rentes cr atures ne sont s par es qu en apparence toutes sont l expression de la m me volont fondamentale qui s exprime dans le monde cf la philosophie de Spinoza C est une illusion le voile de Maya qui nous fait croire l existence d individus s par s au principe d individuation principium individuationis Dans certains tats mystiques notamment dans les tats de transe qui surviennent lors de f tes dionysiaques la f te grecque traditionnelle le concert de rock ou la rave-party contemporaine la musique nous transporte hors de nous-m mes et le voile de Maya se d chire nous prenons soudain conscience que nous faisons un avec le monde que nous sommes travers s par une volont qui nous d passe nous sommes les autres les musiciens la pluie le monde L artiste n chappe pas cette r gle lui aussi est une production de la nature une expression de la volont universelle L art est une cat gorie ontologique g n rale la nature est artiste chaque fois qu elle produit des formes la production des tres naturels l laboration de formes par nos sens les r ves tout cela est art au m me titre que la cr ation de l artiste proprement dit L artiste n imite donc pas la nature c est la nature qui parle en lui qui s exprime travers lui Pour Nietzsche il s agit plus pr cis ment d quilibrer dans l uvre d art l aspect dionysiaque dimension de d mesure et de musicalit li e l ivresse et l aspect apollinien dimension d quilibre formel et d harmonie li e au r ve Enfin le cr ateur ne s adresse pas un public passif mais un spectateur qui contribue activement la cr ation artistique Nietzsche pense un art pour artistes Le lecteur doit contribuer cr er le roman qu il lit par son imagination L art ne vise pas entretenir le r cepteur dans une passivit morbide mais au contraire stimuler sa volont sa cr ativit sa vie le pousser l action et au d passement de soi L artiste ne doit pas montrer le ciel son public mais lui donner des ailes Attrait de l imperfection Je vois ici un po te qui comme tant d hommes exerce un plus grand attrait par ses imperfections que par ce qui sous sa main s arrondit et prend une forme parfaite c est m me sa supr me incapacit bien plus que la richesse de sa force qui lui conf re son avantage et sa gloire Son uvre n exprime jamais pleinement ce qu il voudrait vraiment exprimer ce qu il voudrait avoir vu il semble avoir eu l avant-go t d une vision mais jamais cette vision elle-m me mais son me a conserv une formidable concupiscence pour cette vision et c est d elle qu il tire l loquence tout aussi formidable de son aspiration et de sa faim d vorante Gr ce elle il l ve celui qui l coute au-dessus de son uvre et de toutes les uvres et lui donne des ailes pour atteindre les hauteurs o n atteignent jamais sans cela les auditeurs et ainsi devenus eux-m mes des po tes et des voyants ils vouent l auteur de leur bonheur une admiration aussi grande que s il les avait men s imm diatement la contemplation de son objet le plus sain de son objet supr me que s il avait atteint son but que s il avait r ellement vu et communiqu sa vision Sa gloire tire profit de ce qu il n a pas r ussi atteindre son but Friedrich Nietzsche Le Gai savoir Nietzsche critique d ailleurs partir de cet id al la culture de son poque qu il qualifie d hyst rique le public restant dans un rapport f minin et passif face un artiste qui n est plus qu un com dien II Les fins de l art Introduction La diversit des sentiments esth tiques Diaporama - Beau harmonie quilibre - beaut pure sensations agr ables couleurs formes sons go ts parfums ex Yves Klein voix - harmonie accord couleurs lignes et formes sons Kandinsky Klee - quilibre couleurs sons Poussin Rapha l Vinci Ex paysage coucher de soleil art abstrait musique douce po sie rime et m tre peinture classique - Sublime - Math matique grandeur spatiale - nature ciel toil montagnes nuages - architecture Pyramides Parth non glises gratte-ciel - Daniel Buren au Guggenheim en - cin ma grand cran Star Wars etc - Dynamique intensit opposition combat forces sons couleurs - Parth non glises Schopenhauer - temp te orage volcan explosion - film am ricain - concert de hard rock ou m me classique - Hugo - peinture Bacon expression de forces tensions - Vrai - imitation de la nature - exactitude - Zeuxis D rer Rubens Aristote - jeu d acteur - trompe-l il - effets sp ciaux - restituer l impression sfumato Vinci impressionnisme - v rit et justesse de l expression - jeu d acteur - Van Gogh Munch - Rimbaud et l amour infini - d voilement d une v rit psychologique existentielle r aliste - litt rature Kundera Nothomb Proust - Van Gogh selon Heidegger - expression des forces Schopenhauer Deleuze Bacon - Autres plaisirs intellectuels - comique cf interpr tations Baudelaire Bergson - com die Moli re Chaplin plaisir pris au mal inoffensif - Coluche - bizarre surprise tonnement nouveaut intellectuel - urinoir de Duchamp - surr alisme - la mer est bleue comme une orange - la mer toujours recommenc e ind corable - beau comme la rencontre - Magritte Dal Tanguy Chirico - Ben - le plaisir de la r f rence Proust - beaut d une d monstration math matique simplicit efficacit originalit astuce - Bien - h ros pop e trag die cin ma film am ricain BD - Bruce Willis Tom Cruise Mousquetaires Jean Valjean concepts japonais - wabi beaut de la simplicit naturelle simplicit et sobri t beaut rustique solitude simplicit m lancolie nature tristesse dissym trie repos trouv dans l humble m lancolie du transcendant - sabi beaut de l ancien alt ration par le temps d cr pitude des choses vieillissantes go t pour les choses vieilles la salissure s r nit accompagnant le plaisir de la beaut ma tris e - aware beaut fugitive de la nature - yugen beaut du myst rieux d signe aussi un style de po sie cryptique - iki sophistication naturelle cool classe Wabi et sabi sugg rent des sentiments de d solation et de solitude Ces caract ristiques repr sentent la lib ration du monde mat riel et la transcendance vers une vie plus simple Une illustration du wabi-sabi le culte esth tique pour les pierres A Le beau La seule r gle est de plaire Moli re Le plus simple est encore de consid rer que l uvre d art vise la beaut le plaisir C est d ailleurs le point de vue d fendu par la plupart des artistes L cole classique fran aise notamment d fendait ce principe Voyez Moli re Dorante Vous tes de plaisantes gens avec vos r gles dont vous embarrassez les ignorants et nous tourdissez tous les jours Je voudrais bien savoir si la grande r gle de toutes les r gles n est pas de plaire et si une pi ce de th tre qui a attrap son but n a pas suivi un bon chemin Veut-on que tout un public s abuse sur ces sortes de choses et que chacun ne soit pas juge du plaisir qu il y prend Moli re La Critique de l cole des femmes Sc ne VI Ironie du sort c est partir des uvres de Moli re que l on voulut d finir aux si cles suivant les r gles de l art et du th tre unit de temps de lieu d action etc Le principe de plaisir a t d fendu par de tr s nombreux artistes sinon tous Flaubert Delacroix Baudelaire Wagner Stendhal Les tenants de l art pour l art Th ophile Gautier Flaubert Baudelaire Mallarm etc sont les partisans par excellence de la recherche de la beaut pour elle-m me et refusent toute inf odation de l art un principe tranger On retrouve ce principe sous la plume de Stendhal qui voit caract rise la beaut comme une promesse de bonheur Il est difficile en revanche de trouver une telle conception chez un philosophe peut- tre parce qu elle est trop vidente pour tre digne de mention ou parce que le plaisir ou la beaut restent un principe trop ind termin Certes les artistes recherchent la beaut Mais la question est pr cis ment de savoir ce qu est la beaut La beaut formelle quilibre et harmonie Kant Au sens le plus simple la beaut peut se d finir comme simple plaisir des sens quilibre et harmonie des formes des couleurs des sons On trouve cette beaut dans toute uvre d art en peinture en musique en po sie dans la danse dans l architecture Il s agit l d une beaut toute simple purement esth tique au sens tymologique du terme qui rel ve des sens C est la beaut purement formelle peut- tre superficielle mais qui peut en raison de sa simplicit m me tre combin e avec tout autre aspect de l uvre Rappelons la distinction entre le beau et le joli on peut vouloir essayer de distinguer le beau du joli c est- -dire au fond exclure du beau certaines s ductions jug es trop basses ou charnelles C est ainsi que Schopenhauer disqualifie le joli c est- -dire tout ce qui stimule la volont notamment ce qui s duit ou excite sexuellement Le beau au contraire apaise la volont Pour Kant de mani re assez semblable est beau tout objet qui nous donne satisfaction par le libre jeu des facult s entendement et imagination qu il suscite Le bel objet nous pla t parce qu il pr sente une organisation qui stimule notre esprit et pourtant nous ne comprenons pas quel est le sens ou le concept de cette organisation C est ce que Kant entend par une finalit sans fin Et face un tel objet notre entendement fonctionne librement d o une satisfaction esth tique On devine ici que ce sont les propri t s g n rales d harmonie et d quilibre qui seront l origine d une telle satisfaction C est une beaut de ce genre que visent atteindre les canons esth tiques nombre d or cens constituer une proportion id ale canons du corps humain du visage humain r gles des peintres dans la composition d un paysage teintes brunes au premier plan etc Il est remarquable de constater que la beaut peut tre aussi bien atteinte par l observation de ces r gles que par leur remise en cause la plus radicale Quelques perspectives sur la beaut a Le kitsch Kundera Le concept de kitsch est proche du concept de joli dans l opposition entre le beau et le joli Le kitsch d signe habituellement un art de pacotille un toc clinquant et multicolore r v lateur d un mauvais go t souvent populaire Ce concept prend un sens plus pr cis chez Kundera qui le caract rise dans L Insoutenable l g ret de l tre comme n gation de la merde Le d bat entre ceux qui affirment que l univers a t cr par Dieu et ceux qui pensent qu il est apparu tout seul concerne quelque chose qui d passe notre entendement et notre exp rience Autrement r elle est la diff rence entre ceux qui doutent de l tre tel qu il a t donn l homme peu importe comment et par qui et ceux qui y adh rent sans r serve Derri re toutes les croyances europ ennes qu elles soient religieuses ou politiques il y a le premier chapitre de la Gen se d o il d coule que le monde a t cr comme il fallait qu il le f t que l tre est bon et que c est donc une bonne chose de procr er Appelons cette croyance fondamentale accord cat gorique avec l tre Si r cemment encore dans les livres le mot merde tait remplac par des pointill s ce n tait pas pour des raisons morales On ne va tout de m me pas pr tendre que la merde est immorale Le d saccord avec la merde est m taphysique L instant de la d f cation est la preuve quotidienne du caract re inacceptable de la Cr ation De deux choses l une ou bien la merde est acceptable alors ne vous enfermez pas cl dans les waters ou bien la mani re dont on nous a cr s est inadmissible Il s ensuit que l accord cat gorique avec l tre a pour id al esth tique un monde o la merde est ni e et o chacun se comporte comme si elle n existait pas Cet id al esth tique s appelle le kitsch C est un mot allemand qui est apparu au milieu du XIXe si cle sentimental et qui s est ensuite r pandu dans toutes les langues Mais l utilisation fr quente qui en est faite a gomm sa valeur m taphysique originelle savoir le kitsch par essence est la n gation absolue de la merde au sens litt ral comme au sens figur le kitsch exclut de son champ de vision tout ce que l existence humaine a d essentiellement inacceptable Milan Kundera L Insoutenable l g ret de l tre VI b Le beau est toujours bizarre Baudelaire Selon Baudelaire le beau est toujours bizarre La beaut est irr ductible la science et toute th orie esth tique en raison de cet l ment de bizarrerie qui lui est n cessaire Et Baudelaire de d montrer son id e par l absurde qu on essaie de se repr senter dit-il une beaut banale c est impossible Le bizarre dans l art est similaire l assaisonnement dans les mets ceux-ci ne diff rent sauf en termes d utilit ou de quantit nutritive que par l id e qu ils r v lent la langue La cons quence principale de cette id e est de remettre en question les id es classiques de canons esth tiques le beau ne proc de pas d une composition sym trique et quilibr e etc Le d s quilibre et la bizarrerie peut tre belle elle est m me n cessaire la beaut En plein XIXe si cle marqu par le progr s la modernit et la r volution rappelons que le XIXe si cle a invent le v lo cet appareil qui ne peut tenir debout que quand il avance Baudelaire a insist sur un autre aspect du beau l uvre d art doit parvenir unir intimement en elle l ph m re et l ternel comme l illustre le po me A une passante c Dionysiaque et apollinien Nietzsche Selon Nietzsche la nature cette puissance myst rieuse la source de toute chose est l artiste par excellence Or cette nature s exprime comme l avait vu Schopenhauer comme volont et repr sentation Le monde existe d une part comme repr sentation dans l esprit des tres conscients mais il existe aussi comme volont cette volont qui est l essence de toute chose Spinoza Et ainsi la nature a deux tendances fondamentales deux plaisirs fondamentaux l apollinien et le dionysiaque Ce sont ces deux tendances qui sont l origine du d veloppement de l art L apollinien est le plaisir que la nature prend l apparence c est pourquoi elle produit des ph nom nes c est- -dire des repr sentations Par exemple nos sens sont de grands artistes de grands cr ateurs de formes partir de donn es chaotiques notre il et notre cerveau fabrique formes et couleurs notre oreille fabrique des sons etc Le monde visible est la premi re apparence dont se r jouit la nature A un deuxi me niveau la tendance apollinienne se manifeste dans le r ve qui est une apparence d apparence ici la nature travers ses cr atures jouit supr mement de l apparence L apollinien est donc le plaisir pris aux belles formes aux belles apparences et se manifeste le plus clairement dans les arts plastiques Mais la nature existe aussi comme volont et il existe un plaisir sp cifique cette volont aveugle et commune tous les tres le plaisir dionysiaque Dans l ivresse et la musique notamment s exprime cette volont fondamentale de la nature qui traverse l ensemble des cr atures Dans les tats d extase extr mes la cr ature peut sentir alors son unit profonde avec le monde le principium individuationis c est- -dire le morcellement illusoire de la nature en diff rents individus est alors supprim ce qui produit un plaisir m l d horreur L tat dionysiaque est proche de ce que les Grecs appelaient hubris d mesure et ils lui opposaient pr cis ment la mod ration sophrosun apollinienne qui consiste pr cis ment rester dans les limites de soi-m me se conna tre soi-m me etc Nous aurons fait en esth tique un grand pas lorsque nous serons parvenus non seulement la compr hension logique mais l imm diate certitude intuitive que l entier d veloppement de l art est li la dualit de l apollinien et du dionysiaque comme analogiquement la g n ration dans ce combat perp tuel o la r conciliation n intervient jamais que de fa on p riodique d pend de la diff rence des sexes Ces deux impulsions si diff rentes marchent de front mais la plupart du temps en conflit ouvert s excitant mutuellement des productions toujours nouvelles et de plus en plus vigoureuses afin de perp tuer en elles ce combat de contraires jusqu ce qu enfin par un geste m taphysique miraculeux de la volont hell nique elles apparaissent accoupl es l une l autre et dans cet accouplement en viennent engendrer l uvre d art la fois dionysiaque et apollinienne la trag die attique Pour nous rendre plus proches ces deux impulsions repr sentons-les-nous d abord comme les deux modes esth tiques distincts du r ve et de l ivresse dont les manifestations physiologiques offrent une opposition correspondant celle de l apollinien et du dionysiaque La belle apparence de ces mondes du r ve que tout homme enfante en artiste consomm est ce que pr supposent l ensemble des arts plastiques et m me nous le verrons une large part de la po sie N otre tre le plus intime ce fonds souterrain qui nous est commun tous trouve faire dans le r ve l exp rience d un plaisir profond et d une heureuse n cessit On pourrait d signer Apollon comme la superbe image divine du principium individuationis dont le geste et le regard nous disent tout le plaisir et toute la sagesse de l apparence ensemble avec sa beaut Schopenhauer nous d crit la prodigieuse horreur qui s empare de l homme que d sorientent soudain les formes conditionnant la connaissance des ph nom nes Si nous ajoutons cette horreur l extase d licieuse que la rupture du principium individuationis fait monter du fond le plus intime de l homme ou m me de la nature alors nous nous donnerons une vue de l essence du dionysiaque que l analogie de l ivresse nous rendra plus proche encore Que ce soit sous l influence du breuvage narcotique dont parlent dans leurs hymnes tous les hommes et les peuples primitifs ou lors de l approche puissante du printemps qui traverse la nature enti re et la secoue de d sir s veillent ces motions dionysiaques qui mesure qu elles gagnent en intensit abolissent la subjectivit jusqu au plus total oubli de soi Nietzsche La Naissance de la trag die dionysiaque apollinien Concepts m taphysiques obscurit inconscient volont unit fondamentale de la nature clart conscience repr sentation morcellement de la nature en individus Arts et sentiments ivresse musique hubris d mesure plaisir de se dissoudre dans le monde r ve arts plastiques sophrosun mesure plaisir d tre soi Exemples concrets po sie lyrique Archiloque po sie pique Hom re trag die d Beaut et utilit Gautier On pourrait penser que tout ce qui est utile ou efficace est beau car la nature qui suit le principe d utilit maximale produit des formes magnifiques De m me les objets techniques acqui rent une certaine beaut m me si l efficacit seule est recherch e voyez une charpente en bois ou le profil a rodynamique d une voiture Mais ce point de vue est loin de faire l unanimit Th ophile Gautier le premier partisan de l art pour l art avait des id es bien arr t es sur le rapport entre beaut et utilit Il n y a rien de vraiment beau que ce qui ne peut servir rien tout ce qui est utile est laid car c est l expression de quelque besoin et ceux de l homme sont ignobles et d go tants comme sa pauvre et infirme nature L endroit le plus utile d une maison ce sont les latrines Moi n en d plaise ces messieurs je suis de ceux pour qui le superflu est n cessaire et j aime mieux les choses et les gens en raison inverse des services qu ils me rendent Je pr f re mon pot de chambre qui me sert un pot chinois sem de dragons et de mandarins qui ne me sert pas du tout Th ophile Gautier Mademoiselle Maupin e Beaut et mysticisme Platon Baudelaire Mallarm Enfin le beau peut tre envisag d un point de vue mystique En tant qu id al le Beau se rapproche du divin lui-m me de l Absolu On se souvient comment Platon dans le Banquet faisait de l ascension rotique vers la beaut une l vation mystique vers l absolu Diotime Voil donc quelle est la droite voie qu il faut suivre dans le domaine des choses de l amour ou sur laquelle il faut se laisser conduire par un autre c est en prenant son point de d part dans les beaut s d ici-bas pour aller vers cette beaut -l de s lever toujours comme au moyen d chelons en passant d un seul beau corps deux de deux beaux corps tous les beaux corps et des beaux corps aux belles occupations et des occupations vers les belles connaissances qui sont certaines puis des belles connaissances qui sont certaines vers cette connaissance qui constitue le terme celle qui n est autre que la science du beau lui-m me dans le but de conna tre finalement la beaut en soi Platon Le Banquet trad Luc Brisson b- c Plotin reprendra cette analyse du Beau en un sens minemment mystique L id e est que l art est la rencontre d une forme et d une mati re et que la forme vient d en haut de Dieu tre parfait aussi bien en termes de v rit et de bont que de beaut Prenons si l on veut deux masses de pierre plac es l une c t de l autre l une est brute et n a pas t travaill e l autre a subi l empreinte de l artiste et s est chang e en une statue de dieu ou d homme d un dieu comme une Gr ce ou une Muse d un homme qui est non pas le premier venu mais celui que l art a cr en combinant tout ce qu il a trouv de beau il est clair que la pierre en qui l art a fait entrer la beaut d une forme est belle non parce qu elle est pierre car l autre serait galement belle mais gr ce la forme que l art y a introduite Cette forme la mati re ne l avait point mais elle tait dans la pens e de l artiste avant d arriver dans la pierre et elle tait dans l artiste non parce qu il a des yeux ou des mains mais parce qu il participe l art Donc cette beaut tait dans l art et de beaucoup sup rieure car la beaut qui est pass e dans la pierre n est pas celle qui est dans l art celle-ci reste immobile et d elle en vient une autre inf rieure elle et cette beaut inf rieure n est pas m me rest e intacte et telle qu elle aspirait tre sinon dans la mesure o la pierre a c d l art M prise-t-on les arts parce qu ils ne cr ent que des images de la nature disons d abord que les choses naturelles elles aussi sont des images de choses diff rentes et sachons bien ensuite que les arts n imitent pas directement les objets visibles mais remontent aux raisons d o est issu l objet naturel ajoutons qu ils font bien des choses d eux-m mes ils suppl ent aux d fauts des choses parce qu ils poss dent la beaut Phidias fit son Zeus sans gard aucun mod le sensible il l imagina tel qu il serait s il consentait para tre nos regards Plotin Enn ades IIIe s V L art a toujours entretenu un lien troit avec la religion en raison de sa capacit susciter les sentiments religieux ce qui r v le une affinit entre les sentiments esth tiques et les sentiments thiques Ceci peut s observer dans le frisson particulier que suscite en nous la musique classique religieuse par exemple le Requiem de Mozart Chez les artistes du XIXe si cle comme Baudelaire et Mallarm on retrouve une id alisation similaire du beau Ainsi la qu te esth tique de la perfection devient une v ritable recherche mystique de l absolu Dans un documentaire sur Glenn Gould pianiste virtuose du XXe si cle une auditrice affirme que cette musique lui a r v l l existence de l au-del et du paradis B Le vrai L interpr tation de l art comme un moyen d acc s la v rit est d abord li e l id e que l art serait fondamentalement mim tique c est- -dire qu il viserait imiter la nature Telle tait la conception dominante de l art pour les Grecs et une telle interpr tation ne manque pas de vraisemblance Mais il reste savoir ce qu il faut entendre par imitation de la nature Cela peut signifier que l art cherche reproduire les apparences des choses naturelles ou alors qu il essaie de reproduire plus profond ment le travail cr atif de la nature Si nous prenons d abord l expression au premier sens la possibilit d atteindre la v rit par ce moyen peut sembler compromise l apparence ne s oppose-t-elle pas la r alit L art nous loigne de la v rit car les apparences sont trompeuses Platon Nietzsche C est partir de cette interpr tation de l art comme un art des apparences que Platon critique l art Pour Platon la vraie r alit n est pas constitu e par les apparences ni m me par les objets que nous voyons tous les jours En effet le chat que je vois n est pas v ritablement r el puisqu il mourra et dispara tra un jour alors que ce qui est v ritablement r el doit tre ternel La vraie r alit n est donc pas le chat mais l id e du chat qui demeure une et identique au cours du temps et dont les chats particuliers participent seulement c est- -dire qu ils ressemblent cette id e ils s y rattachent Pour Platon la vraie r alit n est donc pas le monde mat riel des objets sensibles mais un monde id al et abstrait peupl d Id es Par cons quent l uvre d art qui imite les objets du monde est loign e de la v rit de trois degr s par exemple la peinture d un lit est la copie du lit fabriqu par le menuisier qui est lui-m me une copie du lit id al Platon critique donc l art comme l illusion supr me qui ajoute une couche d illusion cette premi re illusion qu est le monde qui nous pr sente l apparence des apparences On retrouve d ailleurs la m me id e chez Nietzsche pour qui l art est un mensonge qui nous aide vivre en rendant la v rit supportable Nous avons l art afin de ne pas mourir de la v rit Nietzsche Werke XVI Par quoi le m tre donne de la beaut Le m tre pose un voile sur la r alit il donne lieu quelque artifice de langage quelque ind cision de pens e par l ombre qu il jette sur les id es tant t il cache tant t il fait ressortir De m me que l ombre est n cessaire plus de beaut de m me l obscur est n cessaire plus de clart L art rend supportable l aspect de la vie en la recouvrant du voile de la pens e ind cise Nietzsche Humain trop humain I Mais il ne faut pas rejeter trop vite les apparences hors du champ de la connaissance Les apparences ne sont-elles pas le point de d part de toute connaissance Et n y a-t-il pas une connaissance propre au sensible L imitation de la nature est un moyen d acc s la v rit Aristote L art peut appara tre comme un moyen d acc s la v rit si nous le consid rons dans sa dimension mim tique comme le faisaient les Grecs Platon et Aristote concevaient en effet l art comme une technique consistant essentiellement imiter la nature Une telle conception n est pas propre aux Grecs on la retrouve tout au long de l histoire de l art par exemple dans le naturalisme de Stendhal un roman est un miroir qui se prom ne sur une grande route Selon Aristote tout art est imitation m me la musique L pop e et la po sie tragique comme aussi la com die l art du po te de dithyrambe et pour la plus grande partie celui du joueur de fl te et de cithare se trouvent tous tre d une mani re g n rale des imitations Mais ils diff rent les uns des autres par trois aspects ou bien ils imitent par des moyens diff rents ou bien ils imitent des objets diff rents ou bien ils imitent selon des modes diff rents et non de la m me mani re Aristote Po tique I Le th tre aussi est con u comme imitation la com die imite les hommes sans grande vertu les vices les d fauts et les laideurs du moins ceux qui n entra nent ni douleur ni dommage car seul le mal inoffensif est comique La trag die elle imite une action noble qui par la piti et la crainte accomplit la catharsis purgation de ces motions Cette dimension mim tique de l uvre d art est ce qui permet de comprendre qu elle nous donne tant de satisfaction car tous les hommes d sirent naturellement conna tre A l origine de l art po tique dans son ensemble il semble bien y avoir deux causes toutes deux naturelles Imiter est en effet d s leur enfance une tendance naturelle aux hommes et ils se diff rencient des autres animaux en ce qu ils sont des tres fort enclins imiter et qu ils commencent apprendre travers l imitation comme la tendance commune tous de prendre plaisir aux repr sentations la preuve en est ce qui se passe dans les faits nous prenons plaisir contempler les images les plus exactes de choses dont la vue nous est p nible dans la r alit comme les formes d animaux les plus m pris s et des cadavres Une autre raison est qu apprendre est un grand plaisir non seulement pour les philosophes mais pareillement aussi pour les autres hommes quoique les points communs entre eux soient peu nombreux ce sujet On se pla t en effet regarder les images car leur contemplation apporte un enseignement et permet de se rendre compte de ce qu est chaque chose par exemple que ce portrait-l c est un tel car si l on se trouve ne pas l avoir vu auparavant ce n est pas en tant que repr sentation que ce portrait procurera le plaisir mais en raison du fini dans l ex cution de la couleur ou d une autre chose de ce genre Aristote Po tique chap IV b - b Et en effet puisque l art est imite les choses il est un moyen privil gi vers la connaissance Ainsi la po sie vise imiter la nature humaine et dans cette mesure elle nous apporte une connaissance de l homme qui est m me sup rieure celle que nous donne l histoire car la po sie dit le g n ral alors que l histoire se contente du cas particulier De ce qui a t dit r sulte clairement que le r le du po te est de dire non pas ce qui a r ellement eu lieu mais ce quoi on peut s attendre ce qui peut se produire conform ment la vraisemblance ou la n cessit En effet la diff rence entre l historien et le po te ne vient pas du fait que l un s exprime en vers ou l autre en prose on pourrait mettre l uvre d H rodote en vers et elle n en serait pas moins de l histoire en vers qu en prose mais elle vient de ce que l un dit ce qui a eu lieu l autre ce quoi l on peut s attendre Voil pourquoi la po sie est une chose plus philosophique et plus noble que l histoire la po sie dit plut t le g n ral l histoire le particulier Le g n ral c est telle ou telle chose qu il arrive tel ou tel de dire ou de faire conform ment la vraisemblance ou la n cessit c est le but vis par la po sie m me si par la suite elle attribue des noms aux personnages Le particulier c est ce qu a fait Alcibiade ou ce qui lui est arriv Aristote Po tique IX Mentir pour faire vrai impressionnistes Maupassant C est ce qui fait dire Am lie Nothomb que le roman est un concentr de r el il y a bien plus de r alit dans un bon roman que dans la vie r elle On pourrait voir une opposition entre le roman et le fait divers entre la peinture et la photographie dans un cas il s agit de repr senter un irr el vraisemblable dans l autre un r el invraisemblable Par exemple les photographies prises au zoom ou sous un angle particulier nous pr sentent des rapprochement de perspective tonnants Mais il faut bien voir que le vraisemblable nous int resse bien plus que le vrai en tout cas dans les nombreux domaines qui sont le terrain privil gi de l art psychologique existentiel etc L histoire de l art nous montre constamment qu il faut bien souvent renoncer au vrai et l exact si l on veut produire le vraisemblable le vivant et atteindre ainsi une plus grande v rit de la repr sentation raccourci des Grecs perspective sfumato de Vinci inexactitudes des impressionnistes artifices rh toriques et litt raires etc Comme dit Maupassant le romancier r aliste ne doit pas tout dire il ne doit pas tre vrai mais faire vrai Le romancier au contraire qui pr tend nous donner une image exacte de la vie doit viter avec soin tout encha nement d v nements qui para trait exceptionnel Son but n est point de nous raconter une histoire de nous amuser ou de nous attendrir mais de nous forcer penser comprendre le sens profond et cach des v nements A force d avoir vu et m dit il regarde l univers les choses les faits et les hommes d une certaine fa on qui lui est propre et qui r sulte de l ensemble de ses observations r fl chies C est cette vision personnelle qu il cherche nous communiquer en la reproduisant dans un livre Mais en se pla ant au point de vue m me de ces artistes r alistes on doit discuter et contester leur th orie qui semble pouvoir tre r sum e par ces mots Rien que la v rit et toute la v rit Leur intention tant de d gager la philosophie de certains faits constants et courants ils devront souvent corriger les v nements au profit de la vraisemblance et au d triment de la v rit car Le vrai peut quelquefois n tre pas vraisemblable Le r aliste s il est un artiste cherchera non pas nous montrer la photographie banale de la vie mais nous en donner la vision plus compl te plus saisissante plus probante que la r alit m me Raconter tout serait impossible car il faudrait alors un volume au moins par journ e pour num rer les multitudes d incidents insignifiants qui emplissent notre existence Un choix s impose donc La vie encore laisse tout au m me plan pr cipite les faits ou les tra ne ind finiment L art au contraire consiste user de pr cautions et de pr parations m nager des transitions savantes et dissimul es mettre en pleine lumi re par la seule adresse de la composition les v nements essentiels et donner tous les autres le degr de relief qui leur convient suivant leur importance pour produire la sensation profonde de la v rit sp ciale qu on veut montrer Faire vrai consiste donc donner l illusion compl te du vrai suivant la logique ordinaire des faits et non les transcrire servilement dans le p le-m le de leur succession J en conclus que les R alistes de talent devraient s appeler plut t des Illusionnistes Guy de Maupassant Le roman pr face Pierre et Jean Un exemple frappant de cette id e en peinture nous est donn par le Derby d Epsom de G ricault Ce tableau repr sente une course de chevaux dans laquelle le mouvement est rendu par une position impossible les chevaux sont peints dans une position qu ils ne prennent jamais au cours de leur galop On pourrait toutefois peut- tre opposer une chose ces id es d art r aliste les repr sentations nous plaisent-elles par leur exactitude ou au contraire par ce en quoi elles ne ressemblent pas la chose Sommes-nous plus int ress s par une photographie en couleur qui donne la r plique exacte d un visage ou par un portrait au fusain qui parvient en capter l essentiel Et de mani re similaire n est-ce pas dans une m taphore ce par quoi l image diff re de ce qu elle illustre qui est int ressant Voyez cela dans un cas concret par exemple dans cette comparaison de Victor Hugo un visage avec beaucoup de front c est comme un paysage avec beaucoup de ciel Sans nier compl tement le plaisir pris l exactitude d une repr sentation nous pourrions donc sans doute ajouter un plaisir pris une analogie imparfaite et ce d autant plus qu elle claire un aspect inattendu de l objet Par quoi l on commence comprendre comment l art peut produire une v rit qui lui est propre participer au d voilement du monde NB on trouve encore la m me id e chez le sculpteur Auguste Rodin le r alisme en art consiste d former pour faire vrai Rodin L Art L expressionnisme Van Gogh De mani re g n rale pour ce qui est de la nature humaine il vaut mieux parler d expression plut t que d imitation car r v ler la nature humaine ne consiste pas en un simple imitation comme quand il s agit de reproduire l apparence d un objet physique cela consiste au contraire en un v ritable travail d exploration et de construction Un lieu privil gi de l expression de l int riorit humaine est ce que les anciens appelaient la po sie c est- -dire en fait la litt rature dans son ensemble Milan Kundera un crivain tch que contemporain montre dans L Art du roman que l histoire du roman europ en consiste en une exploration progressive de l existence humaine Au XVIIe si cle commence l poque moderne avec Galil e et Descartes la science math matique et physique s engage dans l exploration de la nature La passion de conna tre s est empar e de l homme occidental Mais cette perspective laisse tout un champ inexplor le domaine de la vie de l existence humaine La science a compl tement laiss de c t cet aspect C est ainsi que Kundera comprend la formule de Heidegger l oubli de l tre Mais l tre le monde de la vie n a pas t oubli par tout le monde En fait au moment m me o dans le sillage de Descartes les sciences s engagent dans l exploration math matique de la nature les romanciers europ ens s engagent dans l exploration litt raire de l existence humaine Et Kundera relit toute l histoire du roman europ en partir de cette cl de lecture montrant comment le roman a successivement cherch saisir le moi d abord par les actions dans le roman d aventures Cervant s et Rabelais mais avec Diderot une faille s ouvre entre l homme et ses actions les actions ne r v lent plus l homme le roman psychologique tente alors de saisir le moi en restituant directement l int riorit humaine Richardson puis Proust et Joyce le naturalisme tente de son c t de saisir l homme partir de son insertion dans la soci t et l histoire Balzac Zola Kafka enfin les romans du XXe si cle nous d voilent les paradoxes terminaux A chaque fois le roman tudie les possibilit s existentielles Kafka par exemple se demande quelles sont les possibilit s d existence dans le monde moderne enserr dans le carcan touffant de l administration Mais l expression de l int riorit humaine ne se limite pas la litt rature On comprend ais ment que la musique soit le lieu privil gi de l expression des sentiments humains dans leur forme la plus pure Mais la peinture elle-m me peut tre un moyen d expression de l int riorit humaine comme reculons Avec l expressionnisme en effet l artiste nous invite d tourner le regard l essentiel n est plus la chose repr sent e qui la limite n est plus qu un pr texte ni la vraisemblance mais bien la mani re de voir le regard de l artiste sa mani re subjective de percevoir le monde qu il tente de nous restituer On comprend alors qu on puisse parler de la v rit d un tableau m me si celui-ci n est pas du tout ressemblant Le but de l art n est plus de reproduire le visible mais comme dirait le peintre suisse Paul Klee de rendre visible L artiste nous donne acc s une nouvelle mani re de voir les choses il nous d couvre le r el sous un jour nouveau C est en ce sens que l crivain anglais Oscar Wilde peut dire en une formule provocatrice que ce n est pas l art qui imite la nature mais la nature qui imite l art car c est l art qui nous apprend voir et nous en venons voir la nature elle-m me partir des repr sentations artistiques Il faut bien se rendre compte que pour l homme du XIXe si cle le coucher de soleil n tait pas du tout un ph nom ne esth tique Ce sont des artistes comme Turner qui nous ont appris voir la beaut de la nature dans un coucher de soleil dans un paysage enneig voire dans les brumes de Londres Prenons quelques exemples le fondateur de l expressionnisme est Van Gogh Il est tr s clair que sa peinture vise davantage exprimer une mani re de percevoir et de ressentir les choses l ambiance sordide d un caf la vibration palpitante de la nature plut t que d en restituer avec exactitude l apparence objective et neutre Ecoutons-le nous parler de ses recherches esth tiques Qu est-ce que dessiner Comment y arrive-t-on C est l action de se frayer un passage travers un mur de fer invisible qui semble se trouver entre ce que l on sent et ce que l on peut Comment doit-on traverser ce mur sachant qu il ne sert rien d y frapper fort A mon avis on doit miner ce mur et le traverser la lime lentement et avec patience Lettre de Vincent Th o octobre J ai voulu susciter l id e que ces gens qui mangent des pommes de terre la clart de leur lampe ont creus la terre de leurs mains ces m mes mains avec lesquelles ils mangent et ainsi cela sugg re le travail manuel et un plat honn tement gagn Lettre de Vincent Th o avril J ai essay d exprimer les terribles passions de l humanit au moyen du rouge et du vert Lettre de Vincent Th o septembre Dans mon tableau Le Caf la nuit j ai cherch exprimer l id e que le caf est un endroit o l on peut se ruiner devenir fou commettre des crimes Alors j ai cherch par des contrastes de rose tendre et de rouge sang de doux vert Louis XV et V ron se contrastant avec les jaune et les vert-bleu durs tout cela dans une atmosph re de fournaise infernale de soufre p le exprimer comme la puissance des t n bres d un assommoir Et en m me temps avec un apparence de gaiet japonaise et la bonhomie du Tartarin Lettre de Vincent Th o septembre Van Gogh est sans conteste celui qui a le mieux parl de son art mais ce qu crit Antonin Artaud n est pas mal non plus et vous aidera peut- tre comprendre la peinture de Van Gogh La peinture lin aire pure me rendait fou depuis longtemps lorsque j ai rencontr Van Gogh qui peignait non pas des lignes ou des formes mais des choses de la nature inerte comme en pleines convulsions Et inertes Comme sous le terrible coup de boutoir de cette force d inertie dont tout le monde parle mots couverts et qui n est jamais devenue si obscure que depuis que toute la terre et la vie pr sente se sont m l es de l lucider Or c est de son coup de massue vraiment de son coup de massue que Van Gogh ne cesse de frapper toutes les formes de la nature et les objets Card s par le clou de Van Gogh les paysages montrent leur chair hostile la hargne de leurs replis ventr s que l on ne sait quelle force trange est d autre part en train de m tamorphoser Je crois que Gauguin pensait que l artiste doit rechercher le symbole le mythe agrandir les choses de la vie jusqu au mythe alors que Van Gogh pensait qu il faut savoir d duire le mythe des choses les plus terre- -terre de la vie En quoi je pense moi qu il avait foutrement raison Car la r alit est terriblement sup rieure toute histoire toute fable toute divinit toute surr alit Antonin Artaud Van Gogh le suicid de la soci t Le peintre norv gien Edvard Munch a poursuivi cette tendance particuli rement visible dans son chef-d uvre le Cri qui offre une expression saisissante de l angoisse L expressionnisme a donn lieu par la suite l expressionnisme abstrait dont le principal repr sentant est l am ricain Jackson Pollock qui introduisit la technique du dripping qui consiste projeter la toile sur la peinture sans toucher celle-ci avec le pinceau Le tableau est alors l expression directe et imm diate des mouvements de l artiste Avec le passage l abstraction il devient vident que le but de l artiste n tait pas la reproduction d un donn ext rieur mais bien l expression d une int riorit L expression des forces Schopenhauer Deleuze Mais il ne faudrait pas croire pour autant que l art est limit cette alternative d voiler la r alit humaine ou se contenter de reproduire les apparences de la nature Au contraire l expressionnisme de Van Gogh nous montre que ces deux l ments sont parfois indissociables car l artiste exprime un regard c est- -dire la rencontre des choses cet acte intentionnel par lequel le sujet rencontre l objet Exprimer ainsi la rencontre parle aussi bien du sujet que de l objet Schopenhauer insiste sur cette deuxi me dimension Selon lui le monde existe sous deux formes comme volont et comme repr sentation on retrouve les deux grandes cat gories de Descartes et de Spinoza pens e et tendue quelque peu transform es D une part nous percevons les ph nom nes c est- -dire l apparence du monde par les sens sous le mode de l ext riorit et de la spatialit d autre part nous avons une exp rience intime directe du monde dans son essence car nous sommes nous-m mes une partie du monde Or ce que nous trouvons en nous-m mes n est rien d autre que la volont Tous nos v cus de conscience selon Schopenhauer rel vent de la volont en effet comme Spinoza l avait d j montr tous nos sentiments ne sont jamais que des modalit s ou des variations de notre d sir Cette volont est l essence du monde et traverse l ensemble des tres vivants ou non Dans la contemplation esth tique nous percevons cette volont dans les choses ext rieures Ainsi pour Schopenhauer si nous aimons les arbres et l art des jardins c est parce que la v g tation exprime la volont gr ce une opposition de forces l lan vital des plantes vers les cieux s oppose la pesanteur universelle On pourrait d ailleurs remarquer que les uvres de Van Gogh expriment magistralement cette id e d une volont commune qui traverse l ensemble des tres arbres champs montagnes nuages astres tous anim s par une vibration commune De m me la valeur esth tique de l architecture r side dans le fait qu elle nous pr sente des oppositions de forces notamment l opposition entre la r sistance et la pesanteur A partir de ce crit re Schopenhauer affirme que l architecture grecque classique est sup rieure l architecture gothique car les hautes vo tes en ogive donnent une impression de l g ret qui occulte l opposition entre la r sistance des colonnes et la pesanteur de l entablement Le philosophe fran ais contemporain Gilles Deleuze - tend cette id e d un art comme expression de forces la peinture par exemple celle de Francis Bacon - Dans cette perspective l art n appara t plus du tout comme une simple reproduction des apparences mais au contraire comme un moyen d acc s la r alit profonde du monde l essence des choses L art r v le la perception elle-m me Michel Henry Nous avons vu les multiples voies par lesquelles l art nous r v le une certaine v rit par la simple reproduction des apparences naturelles par l expression de l int riorit humaine qu elle soit directe dans la litt rature et la musique ou indirecte dans la peinture et par le d voilement de la r alit profonde des choses et du monde Mais nous pouvons montrer que l art nous apporte une connaissance encore plus sp cifique et que lui seul peut nous apporter car il nous apprend non seulement ce que sont les choses mais aussi ce que sont la perception et la connaissance elles-m mes L art donne voir mais il nous permet surtout de voir la vision elle-m me Par un nouveau d tournement du regard il nous permet d tudier notre rapport premier aux choses la perception En ce sens on peut affirmer avec Michel Henry - que la peinture peut nous montrer l invisible le percevoir lui-m me On ne regarde pas l uvre d art on regarde selon elle avec elle gr ce elle Un peintre comme Kandinsky qui a fait une v ritable th orie esth tique dans laquelle il tudie l effet de chaque couleur et de chaque forme sur notre sensibilit est l exemple type de cet enseignement sp cifique que l art peut nous apporter L art r v le par exemple des ph nom nes comme la synesth sie les diff rentes sensations sont li es dans notre esprit m me si elles rel vent de sens diff rents couleurs go ts etc C est ce qu avait remarqu Merleau-Ponty Nous voyons la profondeur le velout la mollesse la duret des objets C zanne disait m me leur odeur L exp rience esth tique atteint parfois m me ce point singulier que Heidegger avait trouv dans l angoisse o ce qui est per u est la perception elle-m me ce qui appara t est l appara tre lui-m me ce qui est ouvert est l ouverture elle-m me En ce sens l art est une ph nom nologie une tude des ph nom nes c est- -dire des apparences et de notre rapport elles ou encore tout simplement une tude de la vie telle qu elle se manifeste nous Le d voilement de la terre et du monde Heidegger Heidegger insiste sur deux aspects que nous r v le l uvre d art d une part ce qu il appelle la terre c est- -dire la mati re la pierre du temple et aussi la montagne sur laquelle il se trouve l air le ciel et la lumi re o il baigne L uvre d art contrairement l outil n puise pas sa mati re Dans l outil la mati re est asservie la forme L outil domine la mati re dont il est fait elle s efface et s use contrairement l uvre qui la r v le l uvre met en lumi re le fond obscur d o naissent les choses concr tes L uvre met aussi bien la mati re au service de la forme que la forme au service de la mati re c est ce que signifie l union du fond et de la forme La mat rialit de l uvre d art est en est une dimension essentielle D autre part l uvre r v le le monde Ce terme doit tre compris au sens intersubjectif d un monde commun un monde c est un monde fait de croyances communes de r f rences et de valeurs Le temple grec r v le ainsi le monde des Grecs non seulement dans ses dimensions religieuse et artistique mais aussi dans ses dimensions sociale politique et philosophique Le monde est donc l tre des choses c est- -dire la mani re dont elles nous apparaissent ou encore notre rapport elles Les Souliers de Van Gogh expriment l tre des chaussures savoir leur utilit et leur fiabilit qui suppose une appartenance un monde humain et une alliance originaire qui permet d entendre l appel silencieux de la terre Seul le tableau de Van Gogh a pu montrer ce monde paysan du travail des champs et cette pr sence de la terre Ainsi l uvre d art a fait savoir ce qu est en v rit la paire de souliers Elle r v le l tre-outil de l outil sa fiabilit L art est la mise-en- uvre de la v rit de l tant L art est vou par essence la v rit et non la reproduction du r el La dichotomie de Heidegger entre la terre et le monde peut tre rapproch e de l opposition nietzsch enne entre le dionysiaque obscurit de la terre et l apollinien clart du monde des hommes L art est le fruit d un quilibre presque impossible entre un monde historique et la terre inhumaine L art exprime le monde Si notre monde est un non-monde il n est pas tonnant que l art devienne un non-art L art est expression des id es et de l esprit Hegel Enfin la th se selon laquelle l art est un mode d acc s la v rit peut tre soutenue dans une perspective radicalement oppos e l id e d un art qui imite la nature Depuis Platon il existe une tradition philosophique qui consid re que l art est expression des id es Il est assez vident que l art vise cr er des formes incarner des formes dans la mati re Le sculpteur par exemple informe la mati re il la mod le selon la forme qui est dans son esprit A partir de cette observation on peut consid rer que l art est le lieu de la r v lation d un monde id al L esprit du cr ateur Dieu ou l artiste se r v le dans sa cr ation le monde ou l uvre d art C est partir de cette interpr tation que l on peut avoir une approche carr ment mystique de l art et de la beaut Hegel se situe dans la droite ligne de cet h ritage platonicien Ainsi pour lui l art n imite pas et ne doit pas imiter la nature ce serait d choir car l esprit est sup rieur la nature D apr s l opinion courante la beaut cr e par l art serait m me bien au-dessous du beau naturel et le plus grand m rite de l art consisterait se rapprocher dans ses cr ations du beau naturel S il en tait vraiment ainsi l esth tique comprise uniquement comme science du beau artistique laisserait en dehors de sa comp tence une grande partie du domaine artistique Mais nous croyons pouvoir affirmer l encontre de cette mani re de voir que le beau artistique est sup rieur au beau naturel parce qu il est un produit de l esprit L esprit tant sup rieur la nature sa sup riorit se communique galement ses produits et par cons quent l art C est pourquoi le beau artistique est sup rieur au beau naturel Tout ce qui vient de l id e est sup rieur ce qui vient de la nature La plus mauvaise id e qui traverse l esprit d un homme est meilleure et plus lev e que la plus grande production de la nature et cela justement parce qu elle participe de l esprit et que le spirituel est sup rieur au naturel Friedrich Hegel Introduction l esth tique chap I I I Ainsi toute peinture m me celle qui repr sente la nature est un produit de l esprit M me la peinture hollandaise r aliste est en fait le triomphe de l esprit sur la nature elle exprime la victoire du peintre pour saisir le fugitif dans la nature morte et dans les petites choses de la vie quotidienne L art pour Hegel n imite donc pas la nature mais il n en r v le que mieux la v rit car la v rit est quelque chose de spirituel Ainsi la beaut n est rien d autre que la v rit m me En disant donc que la beaut est id e nous voulons dire par l que beaut et v rit sont une seule et m me chose Le beau en effet doit tre vrai en soi Mais y regarder de plus pr s on constate une diff rence entre le beau et le vrai L id e en effet est vraie parce qu elle est pens e comme telle en vertu de sa nature et au point de vue de son universalit Ce qui s offre alors la pens e ce n est pas l id e dans son existence sensible et ext rieure mais dans ce qu elle a d universel Cependant l id e doit aussi se r aliser ext rieurement et acqu rir une existence d finie en tant qu objectivit naturelle et spirituelle Le vrai comme tel existe galement c est- -dire en s ext riorisant Pour autant que ainsi qu ext rioris il s offre galement la conscience et que le concept reste ins parable de sa manifestation ext rieure l id e n est pas seulement vraie mais elle est galement belle Le beau se d finit ainsi comme la manifestation sensible de l id e C est pourquoi l entendement est incapable d appr hender la beaut car l entendement au lieu de chercher atteindre cette unit maintient s par s et ind pendants les uns des autres les divers l ments dont elle est form e C est la subjectivit l me l individualit qui forme le lien de cet accord et repr sente la force qui le maintient en vigueur Friedrich Hegel Esth tique I Conclusion On peut distinguer deux types d art l art qui ajoute une couche qui passe sur la r alit le vernis de la belle apparence l art qui embellit dans le seul but de plaire mais aussi un art qui rebours enl ve une couche vise d chirer la toile du d cor nous rendre le monde visible r v ler la r alit profonde du monde qui nous tait cach e par les apparences et surtout par les conventions les habitudes En ce deuxi me sens l art est tr s proche de la philosophie et au m me titre qu elle il nous permet d atteindre une v rit inattendue On peut atteindre la m me id e par un autre chemin A la question de savoir si l art imite la nature on peut diff rencier la r ponse partir de la distinction entre la nature naturante et la nature natur e La nature naturante est la nature comme force cr atrice la nature natur e d signe l ensemble des tres naturels cr s c est- -dire les apparences Ainsi l art le plus profond ne se contente pas d imiter la nature natur e il imite plut t la nature naturante ce qui le conduit parfois contredire la nature natur e d chirer le voile des apparences Concluons avec Rodin qui ne jure que par la v rit Il n y a qu une seule beaut celle de la v rit qui se r v le C Le bien L art au service de la lib ration supr me Schopenhauer Pour Schopenhauer l art est la solution thique supr me car la contemplation esth tique apaise la volont et r alise notre secret d sir qui est le but de l thique la n gation de la volont On se souvient en effet que pour Schopenhauer la volont est manque donc souffrance et source de toute souffrance L art est le rem de qui permet de nous d faire de cette volont reintante Le beau est ce qui apaise la volont le joli au contraire est ce qui flatte et stimule la volont les nus les victuailles des natures mortes hollandaises Comment l uvre d art parvient-elle annihiler notre volont Principalement en nous montrant le caract re vain de toute volont Toute vell it est condamn e d avance l chec Chaque forme d art montre ce m me chec un niveau diff rent Schopenhauer en d duit un classification des uvres d art car les formes les plus sup rieures sont les plus susceptibles de nous inviter renoncer la volont On trouve d abord l architecture l art des fontaines et des jardins qui ne nous font conna tre que les Id es inf rieures la pesanteur la r sistance la croissance des tres organiques Arrivent ensuite la sculpture et la peinture elles font appara tre les animaux et les hommes c est- -dire des Id es des cr atures qui sont des objectivations plus manifestes de la volont Enfin la trag die et la peinture d inspiration chr tienne sont les uvres les plus pr cieuses car elles ont le paradoxal privil ge de nous montrer le spectacle de l crasement de la volont de sa conversion et de son suicide La trag die doit en effet r v ler le c t terrible de la vie les douleurs sans nom les angoisses de l humanit le triomphe des m chants le pouvoir d un hasard qui semble nous railler la d faite irr m diable du juste et de l innocent La catharsis en veillant la piti et la crainte est un moyen pour que nous nous identifiions au h ros tragique cet tre exceptionnel qui est parvenu percer le voile de Maya de l individualisme et de l go sme et qui parvient ainsi la r signation La trag die est une cole du renoncement et de la p nitence Ce qui donne au tragique quelle qu en soit la forme son lan particulier vers le sublime c est la r v lation de cette id e que le monde la vie sont impuissants nous procurer aucune satisfaction v ritable et sont par suite indignes de notre attachement telle est l essence de l esprit tragique il est donc le chemin de la r signation Arthur Schopenhauer Le Monde comme volont et repr sentation Suppl ment chap Remarquons que la musique a un statut privil gi elle n est pas une copie des Id es formes dans lesquelles la volont s objective mais une reproduction de la volont elle-m me elle exprime directement la chose en soi Elle nous r v le l essence du monde savoir le d sir mais elle ne peut nous en d livrer C est pourquoi elle reste malgr tout inf rieure la trag die Schopenhauer a n anmoins consid rablement lev la musique en lui donnant un statut m taphysique privil gi en en faisant le medium par lequel nous avons un acc s direct l tre Malgr tout l art dans son ensemble est d pass De m me que pour Hegel l art est d pass comme moyen de connaissance pour Schopenhauer l art est d pass en tant que moyen de lib ration thique En particulier l asc tisme n gation du vouloir-vivre par la mise en pratique du renoncement et la piti ce simple sentiment moral qui nous d couvre l unit de tous les tres et de toutes les souffrances sont de meilleurs moyens de parvenir la n gation de la volont L art n est qu une tape dans la lib ration du sage L art au service de la vie Nietzsche Dans la lign e de Schopenhauer Nietzsche envisage lui aussi l art du point de vue du bien quoique en un sens bien diff rent de celui-ci Non seulement Nietzsche prend le contre-pied de son ma tre en affirmant que le bon art est celui qui stimule la volont tandis que l art qui la nie est un art morbide sympt me de d cadence mais surtout Nietzsche pense le bien en un sens non moral Nietzsche envisage l art et juge l art en fonction de sa capacit promouvoir le bien mais ce bien d signe la vie la sant la force et non des vertus morales au sens classique Par exemple Nietzsche s oppose l interpr tation classique de la trag die qui depuis Aristote et jusqu Schopenhauer y voit une catharsis de la crainte et de la piti c est- -dire des sentiments moraux visant l dification du public et m me pour Schopenhauer au renoncement au vouloir-vivre A rebours Nietzsche voit dans cet art le signe d une surabondance de vie et de force qui a pouss les Grecs plonger leurs regards dans ce que l existence a de plus terrible Cette id e d un tre assez fort pour pouvoir supporter le spectacle tragique du monde devient chez Nietzsche l id al qui permet de d finir une thique et le surhomme correspondant il faut tre capable de contempler par-del bien et mal le spectacle de ce monde absurde et cruel et m me d y prendre plaisir L art au service du bien Tolsto La philosophie de Schopenhauer est conditionn e ses pr misses bouddhistes L on Tolsto - d fend de mani re plus g n rale l id e que l art doit tre au service du bien Il n h site pas disqualifier le beau il voit dans le simple sentiment de plaisir esth tique une cat gorie inf rieure et affirme que l art v ritable n a rien voir avec le beau L art beau est celui d une soci t d prav e Tolsto n h site pas condamner ainsi la quasi totalit de l art occidental depuis la Renaissance qu il consid re comme un art bourgeois au service des puissants il condamne ainsi Dante Shakespeare Goethe Beethoven et a fortiori les tenants de l art pour l art surtout quand ils sont obscurs Baudelaire Verlaine Mallarm Ibsen Car l art est avant tout un moyen de communiquer les motions un moyen d union entre les hommes C est parce que l art est au service du bien qu il est universel le bon pla t tout le monde Au fond l art doit faire passer les conceptions religieuses du domaine de la raison au domaine de l motion Tolsto est donc au fond religieux il se convertit au christianisme en mais son christianisme est amend et rationaliste Il rejette d ailleurs toutes les institutions qui s interposent entre l homme et la vraie moralit Etat Eglise famille etc La courte nouvelle de Tolsto dont nous avons d j parl La Mort d Ivan Illich illustre merveille cette conception de l art A la fin de sa vie Tolsto devenu tr s c l bre vivait en toute simplicit dans son village familial fuyant l hypocrisie des salons urbains Un jour il partit de chez lui en vagabond prit froid et mourut d une pneumonie Le go t comme facult thique et politique Kant Arendt Il est clair que l art peut avoir une fonction morale ou difiante Mais peut-on vraiment affirmer que c est l l essentiel Utiliser l art des fins morales n est-ce pas le d tourner de son objet propre qui est la beaut Kant a affirm l existence d un lien plus profond entre le beau et le bien qui permet de voir dans la beaut le symbole du bien et dans le go t une facult morale et politique Ici encore la cl du raisonnement de Kant est dans le caract re d sint ress de la satisfaction esth tique En vertu de ce d sint r t le jugement de go t appara t comme une facult politique car il consiste en la capacit de mettre de c t nos int r ts particuliers pour consid rer ce qui dans une chose doit susciter l approbation de tous C est ce qui fait dire Hannah Arendt que le go t est la facult politique qui humanise r ellement le beau et cr e une culture Cette th orie au fond assez tonnante a t reprise par le penseur et homme politique fran ais Jean Jaur s Il y a galement un lien troit entre l id e de Heidegger selon laquelle l uvre d art est ce qui r v le et instaure un monde commun cf supra et l id e kantienne selon laquelle le go t est la condition existentielle de la politique On trouve encore d autres l ments chez Kant qui relient l esth tique la morale Par exemple le sublime dynamique est une satisfaction troitement li e la moralit ce sentiment consiste face la puissance d cha n e de la nature prendre conscience de notre autonomie morale par rapport toute cette violence c est- -dire au fond opposer cette force une force plus grande encore C est pourquoi explique Kant ce sublime-l ne peut tre ressenti que par les hommes ayant atteint un certain degr de d veloppement moral L art au service du politique Platon totalitarisme art engag La conception kantienne du lien entre le go t et la moralit peut sembler assez abstraite et ce lien assez t nu surtout si on conteste l id e de d sint r t et d universalit qui constitue la cl du raisonnement Le lien entre l art et la politique peut pourtant se comprendre en un sens beaucoup plus simple Du seul fait que l art ait une importance dans la vie des hommes que ce soit au simple niveau esth tique du plaisir et du d plaisir au niveau th orique ou au niveau symbolique le pouvoir politique s il souhaite s assurer une emprise aussi ferme que possible sur les esprits doit en tenir compte C est ce raisonnement qui fait dire Platon que le philosophe roi devra ou bien chasser les po tes de la cit ou bien les maintenir sous son contr le En effet l art tant mim tique il permet d acc der une certaine v rit par exemple la com die nous montre des actions risibles ridicules et honteuses Elle est donc utile pour nous faire conna tre ces vices afin de les viter Le but supr me de l thique est de parvenir l unit la ma trise de soi c est- -dire l accord entre la raison et les sentiments Or l art est l ducation sentimentale par excellence L ducation passera donc aussi par une ducation artistique Il s agit en quelque sorte pour Platon d apprendre chanter juste et marcher droit Puisque l uvre d art a une influence directe sur l existence humaine le l gislateur et le po te sont en concurrence directe C est pourquoi le philosophe roi de la cit id ale devra chasser les artistes ou les soumettre son pouvoir et exercer une censure sur leurs productions Pour les po tes qu on appelle s rieux c est- -dire pour les po tes tragiques si jamais quelques-uns venaient chez nous et nous posaient cette question Etrangers pouvons-nous fr quenter chez vous dans votre ville et votre pays pour y apporter et repr senter nos pi ces Qu avez-vous d cid sur ce point Que r pondrions-nous pour bien faire ces hommes divins Pour moi voici la r ponse que je leur ferais les meilleurs des trangers nous sommes nous-m mes auteurs de la trag die la plus belle et la meilleure que nous puissions faire Notre plan de gouvernement n est qu une imitation de ce que la vie a de plus beau et de meilleur et nous pr tendons que cette imitation est la trag die la plus vraie Vous tes po tes et nous aussi dans le m me genre Nous sommes vos rivaux et vos concurrents dans le plus beau drame celui qu une loi vraie est seule capable de produire comme nous en avons l espoir Ne comptez donc pas que nous vous permettrons jamais si facilement de dresser votre th tre sur notre place publique d y introduire des acteurs dou s d une belle voix qui parleront plus fort que nous qui harangueront les enfants et les femmes et tout le peuple et au lieu de tenir sur les m mes institutions le m me langage que nous diront le plus souvent tout le contraire car on pourrait dire que nous sommes compl tement fous mous et toute la cit si nous vous permettions de faire ce que vous demandez pr sent avant que les magistrats aient examin si le contenu de vos pi ces est bon et convenable dire en public ou s il ne l est pas Commencez donc enfants des Muses voluptueuses par montrer vos chants aux magistrats pour qu ils les comparent aux n tres et s ils jugent que vous dites les m mes choses ou de meilleures nous vous donnerons un ch ur sinon mes amis nous ne saurions le faire Platon Lois livre VII b Une telle id e peut sembler farfelue excessive et surtout choquante voil que Platon veut censurer les arts Pourtant c est bien ce qu ont r alis les r gimes totalitaires du XXe si cle qu ils aient t fascistes ou communistes C est d ailleurs en ce sens aussi que Kundera pouvait parler du kitsch il y a un kitsch communiste et aussi un kitsch capitaliste Toute grande id ologie produit son art correspondant On peut donc voir dans la philosophie de l art de Platon les pr misses du totalitarisme et de l esth tisation de la politique L instrumentalisation politique de l art et de la culture ne se limite pas aux cas extr mes on peut voir dans la d fense en France de la grande culture un dispositif politique qui fonctionne de mani re analogue la mythologie historique et qui vise produire une forme d int gration c est- -dire produire un certain consentement voire une forme de soumission l homme qui a accept d s l enfance la sup riorit d une grande culture qu il ne comprend pas a d j appris se soumettre aveugl ment un syst me de valeur qui le d passe voil une transcendance qui rappelle la transcendance religieuse le dispositif culturel est peut- tre se pr sente comme un dispositif politico-th ologique la cis Dernier exemple mi-chemin entre le dispositif artistique et technique au service d une volont politique l urbanisme contemporain du phalanst re de Fourier au panoptique de Bentham en passant par la Cit radieuse de Le Corbusier Faut-il pour autant r cuser tout lien entre l art et la politique Certains pensent que non qu il faut prendre acte de ce fait fondamental qui est que l art est intrins quement politique ou en tout cas qu il a des cons quences politiques Rien n est neutre Il faut prendre acte de ce fait et opposer l esth tisation de la politique une politisation de l esth tique C est tout le sens de l art engag qui vise d fendre certains id aux par des moyens artistiques On peut citer dans cette cat gorie l art social qui na t avec le roman du XIXe si cle au premier rang desquels Les Mis rables de Victor Hugo et Germinal d

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